Le 5 juillet 1962, l'Algérie accédait à l'indépendance et tous les espoirs étaient permis. Je me rappelle des youyous lancés par des femmes drapées de joies quand novembre avait triomphé du joug colonial. Et depuis, chaque matin dans les écoles avant de rejoindre nos classes, nous chantions en chœurs les chansons patriotiques confectionnées à l'honneur du fasciste stalinien Boumediene, nous les avions apprises par cœur. Quand un chef d’État arrivait, les enfants de toutes les écoles garnissaient les belles avenues d'Alger. Nous restions ainsi parqués sur les trottoirs des heures et des heures à guetter le passage du Président en compagnie de son hôte. Nous étions remplis d’un sentiment de fierté à subir de telles expectatives, car nous croyions en ce qu'ils nous avaient enseigné. Nous pensions qu’en criant haut et fort « vive Boumediene » à son passage, nous prouvions notre amour et notre attachement à la Patrie. Au fur et à mesure que nous grandissions, que ce soit à l’école ou dans les colonies de vacances, les chansons patriotiques ne nous quittaient pas, elles nous catapultaient dans le passé que nous n’avions pas vécu. Par le chant, nous combattions la France « impie », le chant nous frayait un chemin à travers les montagnes en compagnie des maquisards. Nous avions vécu une adolescence soumise aux idéaux. Les idéaux, comme les hommes peuvent êtres fous. Les nôtres sont restés faux ; seul, l’emblème national reste épargné par le dégoût, par contre, la nation, le peuple, l’unité ne sont plus que des mots scandés aujourd’hui dans l’indifférence générale.

MOUFDI, L’EMBLEME ET Landjiré…Wan, Tou, Tré !-CHAGHALNA L’WARA, WA MALAENA EDDOUNA (Nous avons charmé l’humanité et conquis l’univers)-BI CHI3’RINE NOURATILOUHHOU KA ‘SSALAT (Avec une poésie que nous récitons comme une prière)-TASSABIH’OUHHOU MINE H’ANAYA L’DJAZAYER(Dont les psalmodies fusent des profondeurs de l’ALGÉRIE).MOUFDI ZAKARIA.

Takfarinas a dit que l’Algérie est amazighe et que Tamazight sera un jour officielle chez elle. C’est juste une question de temps. Lors de son spectacle, il a scandé haut et fort avec ses milliers de fans : Imazighen! Samir Ben, correspondant du quotidien El Watan, qui a adoré l’événement et apprécié la rencontre avec Tak a dit à son tour : « ma première conférence de presse en kabyle, la langue de mes ancêtres nord-africains. »

Qui sont ces nouveaux inquisiteurs qui décident pour nous que tel spectacle ou tel artiste outrepasse les règles de la bienséance, frôle la xénophobie, distille la haine ou tout autre prétexte destiné à le museler et par l’effet même à occulter son message? C’est bien connu que quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage!

Jacques Brassard, vieux cheval de retour heureusement réformé comme tant d’autres du PQ, pousse tellement à droite ses penchants nationalistes étroits qu’il s’est reconverti en croisé islamophobe, nous infligeant, en guise de message humaniste du Vendredi Saint 6 avril 2012, un réquisitoire allègrement xénophobe intitulé Les oubliés. À en croire cet ex-politicien dont la carrière aura consisté surtout à ostraciser « les autres », notamment les Anglais et les fédéralistes francophones, s’est trouvé un nouvel ennemi à se mettre sous la dent insatiable, l’islam, accusé de mener une « véritable entreprise de purification religieuse ». Il se place ainsi ouvertement, comme tout occidental obtus niant des réalités internationales et tentant de cacher l’impérialisme qui ravage le Sud, où vivent les musulmans, par la fuite en avant d’une persécution dont les chrétiens seraient victimes « partout dans le monde musulman »

Au-delà de son aspect rébarbatif n’intéressant que les chevillards et les loucherbems, le débat sur la viande halal révèle au grand jour deux visions diamétralement opposées du vivre-ensemble au Québec. Et aussi bizarre que cela puisse paraître, ces deux projets de société sont actuellement portés (probablement à leur corps défendant) par deux femmes aux prénoms foncièrement arabes : Djemila et Rima.

Nous serions très intelligents, semble-t-il, forts, et plus encore perspicaces, bien plus que les autres peuples de toute la région du monde arabe qui ont cédé à la manip pour changer le cours de l’histoire de toute la région et mettre en péril des dictateurs, quand ils ne les ont pas simplement abattues.

J’appartiens à un courant de pensée - naguère clandestin et aujourd’hui à peine toléré - qui assument la berbérité du sou continent nord africain. Nous avions revendiqué cette identité alors qu’une chape de plomb couvrait partout notre voix parce qu’elle correspondait à une réalité historique et sociologique