Quelque 3100 individus pourraient perdre leur citoyenneté canadienne

 


Ottawa — Le gouvernement fédéral n’a pas fini de serrer la vis aux immigrants qu’il soupçonne d’avoir fraudé pour obtenir leur citoyenneté canadienne. Ottawa a maintenant dans sa mire 3100 individus qui auraient contourné le système et, si tel est le cas, il entend leur retirer ce statut. Et 7500 autres personnes font l’objet d’une enquête d’Immigration Canada a annoncé lundi le ministre Jason Kenney.

Le ministre de l’Immigration en a assez d’entendre parler de résidents permanents ou de citoyens canadiens qui résident toujours dans un pays étranger, tout en profitant du système de santé public ou des universités canadiennes sans payer pour leurs enfants les coûteux frais d’étudiants étrangers. Le Canada serait la cible d’un vaste système de fraude internationale, selon le ministre, qui a souligné avoir pris connaissance de publicités sur Internet qui vantent les avantages d’une citoyenneté canadienne et qui encouragent à en tirer profit.

« Malheureusement, il y a une industrie mondiale d’agents d’immigration et de citoyenneté sans scrupules, sans éthique, qui se font passer pour de légitimes consultants, qui vendent aux gens des conseils pour escroquer le système canadien », a-t-il déploré. L’exemple le plus répandu, c’est de fournir une fausse adresse en sol canadien, ce qui permet aux demandeurs de devenir citoyens même s’ils n’ont pas résidé trois ans au pays avant de faire leur demande, tel que requis par la loi.

« Une famille de cinq peut payer jusqu’à 25 000 $ sur une période de quatre ans ou plus pour maintenir l’illusion qu’elle réside au Canada […] La citoyenneté canadienne n’est pas à vendre », a martelé M. Kenney en point de presse.

 

Résidents permanents

Son ministère tentera donc de révoquer la citoyenneté de 3139 citoyens canadiens. Et quelque 5000 résidents permanents qui auraient aussi fraudé « feront l’objet d’une surveillance accrue » s’ils tentent de revenir ou de devenir citoyens. Jusqu’à présent, 530 lettres d’avis ont été envoyées, 506 demandes de citoyenneté ont été refusées et 614 résidents permanents ont été renvoyés chez eux. Chaque année, quelque 160 000 personnes obtiennent leur citoyenneté. Depuis 2010 et le début de cette campagne d’Immigration Canada, 19 citoyennetés ont été révoquées - un processus complexe qui dure en moyenne deux ans. Le ministre doit obtenir l’aval du Conseil des ministres, qui fait la recommandation, après quoi le dossier aboutit en Cour fédérale. Afin d’accélérer le tout, M. Kenney a dit qu’il proposera d’éliminer le recours à ses collègues pour aller directement aux tribunaux - ce qui permettrait de gagner 18 mois, croit-il.

Et à son avis, il était grand temps d’agir. Depuis l’adoption de la Loi sur la citoyenneté en 1947, 70 personnes s’étaient vu retirer leur citoyenneté. « La vraie question, c’est pourquoi on ne l’a pas fait auparavant », a-t-il dénoncé.

Or, selon l’opposition, le problème existe, mais ce ne devrait pas être la priorité absolue du ministre. « Le plus gros problème c’est les individus qui sont qualifiés, qui répondent aux critères, et dont les délais de processus les privent de leur citoyenneté - un chiffre qui dépasse les 100 000 personnes », a accusé le libéral Kevin Lamoureux.

Sa collègue néodémocrate Sadia Groguhé estime que M. Kenney ferait mieux d’agir en amont, en s’assurant d’avoir assez de fonctionnaires pour que le système roule rondement et en s’attaquant aux consultants malhonnêtes. Le ministre a indiqué qu’il tenterait de modifier la Loi pour exiger que les consultants des demandeurs de citoyenneté soient reconnus par un organisme de réglementation.

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Les républicains dénichent un faux Américain canadien

Ottawa — En vue de l’élection présidentielle aux États-Unis, les républicains de l’État de la Floride tentent eux aussi de débusquer de faux citoyens, dans le cadre d’une campagne pour restreindre les mesures d’identification des électeurs.

Après des mois d’enquête, ils en ont trouvé un : le Canadien Josef Sever, 52 ans, qui a plaidé coupable en Cour fédérale la semaine dernière d’avoir faussement allégué être un citoyen américain et d’avoir voté illégalement aux élections présidentielles de 2004 et 2008. La fausse citoyenneté de M. Sever lui a aussi permis d’acheter des armes à feu et d’obtenir un permis de port d’arme dissimulée.

M. Sever risque cinq ans d’emprisonnement. Il connaîtra sa sentence le 9 novembre, trois jours après l’élection présidentielle américaine.

Source: Le Devoir - 11 sept 2012