Une Montréalaise de 38 ans, dont les proches soulignent à grands traits la générosité, est décédée après plus de trois mois aux soins intensifs dans un hôpital turc en raison d’une chirurgie bariatrique qui a tourné au cauchemar.
«Je ne suis pas bien, je suis déprimé, stressé. J’ai perdu la femme de ma vie», lance, dévasté, Sami Touggari.
Sa femme, Soumia Khabzagua, est décédée lundi dernier dans un hôpital privé d’Istanbul, en Turquie.
L’aide-pâtissière avait quitté le Québec le 28 mars dernier afin d’aller subir une gastrectomie en manchon (sleeve) pour la somme de 10 000 $.
Ce type de chirurgie bariatrique destiné aux personnes aux prises avec de l’obésité sévère consiste à retirer les deux tiers de l’estomac afin de réduire sa taille, et du même coup l’appétit du patient.
Elle avait choisi la Turquie pour ses coûts plus faibles, ses délais plus rapides et ses exigences moins sévères qu’au Québec.
Un massacre
Mais dès les débuts de la chirurgie, une hémorragie interne importante est survenue, touchant même l’aorte, selon un court document médical consulté par Le Journal.
«C’était un massacre, c’est honteux de voir des gens comme ça [...] Le comportement des médecins est inhumain», affirme Ahadda Ghandjaoui, qui s’est rendue en Turquie au chevet de son amie.
La mère de trois enfants, qui a immigré de l’Algérie il y a une dizaine d’années, a été plusieurs semaines dans le coma. Son état s’est ensuite dégradé très rapidement dans les jours précédant sa mort.
Le frère de Mme Khabzagua était alors au milieu de longues démarches afin de pouvoir lui rendre visite une dernière fois.
«Le frère de Soumia a reçu la procuration le matin et elle est décédée la nuit suivante», souffle son amie Dalila Ghazali.
Sami Touggari déplore le manque d’appui d’Ottawa dans le dossier de sa femme.
«Elle est entrée en Turquie avec un passeport canadien, ce sont eux qui devraient l’aider», lâche-t-il, précisant que ce sont plutôt les services consulaires algériens qui l’ont soutenu dans ses démarches.
Il a notamment cogné aux portes du consulat canadien à Istanbul, de son député fédéral et du ministère canadien des Affaires étrangères.
En souvenir
Avant que la famille de Mme Khabzagua ne s’envole vers Alger, où son corps sera rapatrié, des proches ont tenu mercredi soir à lui rendre un dernier hommage dans une mosquée de Montréal-Nord.
«Partir en bonne santé et revenir en cercueil, je n’arrive pas à accepter ça. C’est inhumain», soupire Amal Mechti, une collègue de travail.
«C’était une femme adorable, serviable, gentille, qui pense à sa famille. Elle nous aidait, nous donnait des conseils», se remémore Kahina Tahi, l’une de ses amies.
En parallèle, des proches de Mme Khabzagua comptent intenter dans les prochains jours des procédures judiciaires contre l’hôpital BHT, où elle séjournait.
Ils souhaitent notamment obtenir une copie du CD de l’opération et son rapport médical détaillé, ce que l’hôpital refuse de fournir.
L’agence de voyages International Clinics, avec laquelle Mme Khabzagua avait fait affaire, et l’hôpital BHT n’ont pas répondu aux demandes du Journal
À la suite de pressions de l’avocat turc de la famille, une autopsie a pu être réalisée à Istanbul, afin de connaître les causes exactes du décès. Les résultats ne sont pas encore connus.
Une deuxième autopsie sera aussi faite par les autorités algériennes lors de la réception de la dépouille.
«Si le corps d’une personne décédée à l’extérieur du Québec n’est pas transporté au Québec [...], il n’y aura pas intervention d’un coroner», précise pour sa part le bureau du coroner.
https://www.journaldemontreal.com/2022/07/08/operation-fatale-a-linternational