Un député du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD - opposition) a été grièvement blessé samedi lors de la tentative de marche, réprimée par d'importantes forces de l'ordre, contre le régime dans le centre d'Alger.

Tahar Besbes a été "agressé par au moins deux policiers", selon le chef du groupe parlementaire du RCD, Athmane Mazouz. "Il s'est retrouvé entouré par des policiers. L'un d'eux lui a donné un coup de pied au ventre et un autre au visage. Il s'est écroulé à terre et sa tête a heurté le sol".

Selon le Dr Rafik Hassani qui se trouvait à ses côtés à l'hôpital Mustapha tout proche, M. Besbes "souffre d'un traumatisme crânien avec perte de connaissance, d'un polytraumatisme très probablement de plusieurs membres". "Il a repris connaissance et somnole", a-t-il ajouté.

Tahar Besbes faisait partie des manifestants qui avaient tenté d'atteindre la Place du 1er mai pour participer à une marche à 11h00 (10H00 GMT) à l'appel de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) qui devait les mener jusqu'à la Place des Martyrs, à quelque 4 km de là.

Deux autres manifestants, le secrétaire général du Snapap (Syndicat national autonome du personnel d'administration publique), Rachid Malaoui, et un sexagénaire s'étaient auparavant évanouis sous la pression exercée contre eux par l'important cordon policier. Ils ont été évacués par les pompiers, a constaté un journaliste de l'AFP.

Car d'importantes forces de sécurité et des dizaines de véhicules blindés étaient présentes depuis les toutes premières heures de la matinée et bloquaient tous les accès au lieu de rendez-vous.

Selon une source officielle, interrogée par l'AFP, "neuf unités de police avaient été mobilisées sur la place, une unité comprenant entre 90 et 120 éléments" pour cette manifestation, interdite, comme elles le sont toutes dans Alger depuis 2001. Au-dessus, tournoyait un hélicoptère

Les policiers, casqués et dotés de matraques et de boucliers, ont réussi à repousser de petits groupes de jeunes qui criaient "Algérie libre et démocratique", "pouvoir assassin", "le peuple veut la chute du régime".

Certains, brandissant des cartons rouges contre le régime, se sont "retrouvés saucissonnés de manière scientifique" selon l'expression du Dr Hassani, par les forces de l'ordre dans les rues adjacentes.

A un moment donné, alors qu'ils se tournaient pour marcher -faute de mieux-, dans une autre direction, un groupe de policiers a chargé, selon des témoins.

Parmi les manifestants, figuraient le président de la Ligue algérienne des droits de l'homme (LADDH), Moustapha Bouchachi, et Abdenour Ali-Yahia, 90 ans, président d'honneur de cette organisation.

Il était très difficile de déterminer le nombre de manifestants. En tout, ont noté des journalistes, ils devaient être quelque 3.000 personnes, manifestants, badauds et policiers confondus, avant de se disperser petit à petit.

Une vingtaine de jeunes gens favorables à Abdelaziz Bouteflika sont arrivés avec des portraits du président scandant: "policiers, laissez-nous en découdre avec eux", les opposants.

A Oran, la CNCD a obtenu l'autorisation de tenir un rassemblement dans la salle Es-Saada (ex-Colisée) qui a rassemblé dans la matinée environ 150 personnes. Plusieurs orateurs se sont succédé à la tribune, dont des jeunes, avant de se séparer dans le calme, selon un correspondant de l'AFP.

Le 3 février, M. Bouteflika, au pouvoir depuis douze ans, puis jeudi dernier son Premier ministre Ahmed Ouyahia, ont fait des promesses d'ouverture, dont la levée de l'état d'urgence en vigueur depuis 19 ans.

La CNCD, qui regroupe des membres de la société civile, des syndicats autonomes et des formations politiques d'opposition, a été créée le 21 janvier dans la foulée des émeutes meurtrières du début de l'année qui ont fait 5 morts et plus de 800 blessés.