Le feed-back de la saison 3 de la série Djemaï Family a fait couler beaucoup d'encre durant ce mois de ramadhan. Certains parlent d'un travail bâclé, d'autres d'une série qui a pris les couleurs d'un énorme spot publicitaire pendant que le reste remet la mauvaise qualité du travail diffusé à la télévision nationale sur le dos d'un manque de créativité et de compétences. Rencontré au café populaire Novelty de Bab Essebt, pas très loin de son domicile dans le coeur même de la ville des roses, dont il est natif, Salah Ougrout alias Souilah «Dja elma» ouvre son coeur avec une spontanéité et une simplicité qui ne lui sont guère étrangères.



L'expression: En tant que principal acteur de la série «Djemaï Family», parlez-nous un peu de cette 3e saison?
Salah Ougrout: Cette année, c'était une nouvelle expérience pour nous, vu que le sitcom a balancé vers le style feuilleton. Personnellement, j'avais hésité à accepter le rôle car je souhaitais rester dans le même contexte que les deux premières saisons, c'est-à-dire le sitcom. J'ai fini par le jouer par conviction qu'il n'y a que Djemaï qui peut jouer Djemaï.

Etes-vous de l'avis des téléspectateurs algériens et des professionnels qui ont vivement critiqué cette 3e saison en la qualifiant de travail raté?
Il faut le dire, l'intention de Djaâfar Gacem était bonne, mais il y avait beaucoup de contraintes. La plus importante était l'absence de scénariste. Pour cette troisième saison, le scénariste n'est pas celui qui avait fait les deux précédentes. C'est ce qui explique la cassure entre tous les personnages des deux saisons précédentes et celle de cette année. Malheureusement, le scénariste ne les a pas bien dessinées et n'a même pas suivi les mêmes caractéristiques. On ne voyait plus Aristo (le fils), le philosophe de la famille Djemaï ni la psychologue (l'épouse de djemaï) parce que tout simplement le nouveau scénariste ne connaît pas ces personnages. Ils étaient alors complètement noyés et c'est ce qui a fait que le téléspectateur soit déçu. Il était habitué à voir des personnages avec des caractéristiques bien précises, et cette année, il a retrouvé beaucoup de différences. La plupart des téléspectateurs que j'ai rencontrés m'ont transmis leur déception, mais l'ont tout de même suivi jusqu'au dernier épisode et l'ont fait pour Djemaï. De toute façon, c'est ce que tout le monde me disait. Dieu merci, Djemaï a sauvé Djemaï Family!
A mon avis, c'était un travail moyen mais pas celui qu'attendaient le téléspectateur. Rater un travail, cela peut arriver aux plus grands cinéastes de Hollywood.

Reprendre des travaux cinématographiques du cinéma algérien ou mondial à l'exemple d'El Hariq ou le personnage de Shrek et le Dr House, n'est pas synonyme d'absence d'idées ou de manque de créativité?
Je ne crois pas. C'était la manière du réalisateur de rendre hommage aux grands noms du cinéma algérien. Djaâfar Gacem est tout de même très connu à travers ses produits et les capacités professionnelles terribles. Il a fait un «tabac» avec Nass Mlah City, Maouîd mâ al kadar ou encore les deux Djemaï Family. Je n'étais pas très satisfait parce qu'on aurait pu faire mieux avec le même scénario. Le scénariste aurait pu par exemple faire en sorte que la famille de Djemaï soit poursuivie non pas par la police, comme c'était le cas, mais par les bandits, juste pour montrer que la famille de Djemaï, le taxieur, est censée être une famille exemplaire qui reflète les principes et les traditions de la famille algérienne en général.

Ne pensez-vous pas que faire un travail raté comme Djemaï Family 3 peut nuire à votre carrière?
Du tout! Je ne crois pas qu'il existe un artiste placé en haut du podium et un autre en bas de l'échelle. Un artiste reste un artiste même s'il donne un produit raté, comme vous le dites. Salah Ougrout joue de la même manière, toujours sincère et naturel dans ses rôles et je pense que c'est ce qui fait ma popularité auprès des grands et des petits, même dans les zones les plus enclavées du pays. En plus, le réalisateur voulait tenter l'expérience d'une comédie dramatique alors que les donnes actuelles de notre société et les changements qu'elle a subis ont qu'il n'y a que le rire qui les accrochent à leurs petits écrans. Nous avons tant bien que mal pu rendre le sourire à une population complètement perdue, sans repères ni boussole. Même si en général les critiques étaient négatives et décourageantes, on a tout de même réussi dans bon nombre d'épisodes à faire oublier à l'algérien les soucis de la journée.

On a remarqué que vous n'avez pas chômé durant ce Ramadhan avec la participation à des festivals du rire?
Heureusement non. J'ai été convié à plusieurs manifestations, mais je n'ai pu y participer, sauf à une fois à la salle Ibn Zeydoun dans le cadre d'une soirée de circoncision collective et à un tournoi organisé dans la wilaya d'Oran avec les joueurs de l'EN de 1982. C'était très convivial et j'avais vraiment apprécié.

Que pensez-vous des autres programmes diffusés durant ce ramadhan?
Franchement, je ne regardais que Djemaï Family (avec un grand sourire) parce que c'était le premier programme diffusé. Je sors après pour aller aux tarawihs; ensuite, j'adore prendre un thé avec les amis et les voisins dans l'un des cafés du quartier. Je n'aime pas trop les endroits où le protocole est maître des lieux mais plutôt ceux où je suis moi-même, sans masque. Souilah est très populaire et modeste et il le restera même si j'ai le prix du meilleur acteur au monde. Je n'ai pas changé de milieu ni de vie; je suis toujours dans ma ville natale et avec mes amis d'enfance et mes proches.

Des projets?
Pour le moment, rien de concret à l'horizon. Ici en Algérie, l'artiste ne travaille qu'une fois par an. J'ai l'impression parfois d'être comme le croissant de l'Aïd. Ceci empêche l'artiste d'évoluer, de diversifier les rôles interprétés et de voir plus loin. Avec mon épouse, Fatima Belhadj, on a un projet de feuilleton qui pourrait détrôner les meilleurs des feuilletons historiques dans le cinéma arabe à l'exemple de Bab El Hara. C'est un travail qui a nécessité trois années de recherche et j'espère que ce produit sera accepté et tourné.

Source: l'Expression