Samir Slimani, mieux connu sous son nom de rappeur « Enima », est recherché pour avoir tiré sur un homme, le 16 juin dernier, à Toronto. Frappé d’un mandat d’arrestation au Canada, il est plutôt en Algérie, pays dont il a la nationalité.

L’homme de 26 ans est recherché pour voies de fait graves, pour possession d’armes à feu et pour une infraction liée aux armes à feu. « Il a été impliqué dans une altercation avec un autre homme sur qui il a tiré, écrit dans un courriel à Radio-Canada l’agent de relations publiques du Service de police de Toronto David Hopkinson. Les blessures étaient graves, mais ne menacent finalement pas la vie de l’individu. »

Depuis le début de l’année, la police dans la Ville Reine a comptabilisé 267 fusillades, s’approchant du triste record de 428 de l’an dernier.

Du Canada à l’Algérie

L’avocat responsable du dossier d’immigration de Samir Slimani, Stéphane Handfield, n’était pas au courant qu’il se trouvait dans le pays d’Afrique du Nord. À sa connaissance, il devait faire un déplacement en Europe pour des contrats. « Il m’a seulement consulté au sujet d’un voyage en France, pour la musique », dit-il.

Me Handfield refuse de commenter la nature des événements pour lesquels l'artiste est soupçonné. « Il faut attendre de voir la fin du processus, dit-il. C'est un mandat d'arrestation. Combien de fois les accusations ne sont finalement jamais portées? »

Samir Slimani a refusé les demandes d’entrevue de Radio-Canada. « Enima ne fera aucun communiqué et ne se prononcera sur aucune nouvelle », affirme son agent de promotion, Rabah Aït Ouyahia.

Sur son profil Instagram, l’artiste semble être à l’étranger depuis quelques semaines. On le voit notamment qui pose devant une station balnéaire ensoleillée.

M. Aït Ouyahia confirme que Samir Slimani a quitté le pays au cours des dernières semaines. « Il a eu des problèmes et il a dû partir en Algérie, dit-il. Mais la musique ne s’arrête pas. Il y a même un single qui va sortir bientôt. »

Il n’y a pas de traité d’extradition entre le Canada et l’Algérie. Le pays du Maghreb n’est donc pas tenu de livrer le fugitif aux autorités canadiennes.

Enima est un des acteurs les plus populaires de la scène rap indépendante québécoise. Il est connu pour ses textes crus qui abordent la réalité de la rue et du monde criminel, dont le proxénétisme et le trafic de drogue.

Au Canada pendant 15 ans

Arrivé au pays à 11 ans, le rappeur algérien n’a jamais obtenu sa citoyenneté canadienne. Il a même été déclaré interdit de territoire en 2014 pour « grande criminalité ».

« Durant son adolescence, le défendeur est reconnu coupable de plusieurs infractions criminelles, pour lesquelles il écope de diverses peines de détention sous surveillance dans la collectivité, écrit la juge Sylvie Roussel dans une décision rendue en janvier dernier. À l'âge adulte, il continue d'accumuler les condamnations criminelles. »

En mars 2018, la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié lui donne une nouvelle chance et lui offre un sursis de cinq ans pour des raisons humanitaires. Une décision qui sera maintenue par la cour fédérale.

« Il semble éprouver des remords sincères, écrit la juge Roussel. Il s’engage à respecter toutes les nouvelles conditions qui lui seront imposées puisqu’il a désormais quelque chose à perdre, soit sa nouvelle carrière de rappeur », ajoute-t-elle.

« Si M. Slimani était reconnu coupable, son sursis serait mis en péril, croit Me Handfield. Ce serait pratiquement un automatisme. » Selon l’avocat, pour mettre fin au sursis émis par la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, il faudrait que le rappeur soit reconnu coupable d'une infraction dont la peine maximale est d'au moins 10 ans de détention. C'est le cas d'une accusation de voies de fait graves, dont la peine d'emprisonnement maximale est 14 ans.

Des démêlés avec la justice

Samir Slimani est un habitué des salles d'audience. En 2017, La Presse révélait qu’il était arrêté à Brampton, en Ontario, pour voies de fait, traite de personne et proxénétisme. Quelques mois plus tard, il était appréhendé à Montréal avec une femme qui avait en sa possession une arme à feu chargée et des munitions. Ces accusations ont depuis été retirées.

Par ailleurs, l'avocat Serge Lamontagne, qui a représenté Samir Slimani dans ses démêlés judiciaires à Montréal, affirme ne plus être en contact avec son client et ne pas être informé de sa situation.

En mai, le rappeur du quartier Saint-Léonard, à Montréal, faisait les manchettes lorsque l’actrice principale de la série Fugueuse, Ludivine Reding, l’a rejoint sur scène et en coulisse pendant le festival Metro Metro au Parc olympique à Montréal. Dans un message sur Facebook publié le lendemain, elle a estimé avoir commis « une erreur ».

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1261976/enima-rappeur-algerie-police-toronto