Rencontre avec Omar Chikh. Directeur du Centre funéraire musulman de Montréal.

– Est-ce que les Algériens du Canada qui décèdent se font automatiquement rapatrier en Algérie ?

Sur 10 décès, 8 se font rapatrier pour être enterrés en Algérie. C’est émotionnel et subjectif. On reste attaché au pays surtout que les parents sont enterrés là-bas.

Mais la tendance s’inverse. On remarque de plus en plus une hausse des enterrements ici au Canada. Certaines familles sont à la troisième génération. Les enfants sont nés et ont grandi ici. Les cimetières sont propres et bien organisés. Dans ce cas, il est préférable de se faire enterrer au Canada pour ne pas compliquer le recueillement de ceux laissés derrière nous.

– Un rapatriement en Algérie ou un enterrement au Canada n’est pas gratuit. Comment s’organisent les familles lors d’un décès ?

Les frais sont entre 5000 et 6000 dollars. Sur 10 décès, nous avons 4 cas de collecte d’argent auprès de la communauté. A peine 10% des gens sont assurés. Quand les gens ont un bon travail ou travaillent dans de grandes entreprises, ces dernières leur proposent des assurances-vie.

Ceux qui posent problème sont ceux qui travaillent dans des petites entreprises ou qui travaillent à travers des agences de main-d’œuvre. Nous avons mis en place des ententes de type préarrangements funéraires, une nouveauté dans la communauté. Une quarantaine d’ententes ont déjà été signées [le Centre funéraire musulman de Montréal –  Dar El Imane est affilié à l’entreprise de services funéraires Magnus Poirier, ndlr].

– La loi de finances 2017 a prévu une prise en charge pour les rapatriements des Algériens nécessiteux.  Est-ce que les gens en bénéficient au Canada ?

Personne n’en a bénéficié. Elle n’est pas appliquée [le gouvernement n’a pas encore publié les textes exécutifs, ndlr].

– L’opinion publique affirme que contrairement à l’Algérie, le Maroc et la Tunisie prennent en charge leurs ressortissants !

Il n’y a que la Tunisie qui le fait. Le Maroc le fait à travers des assurances. Certes en Algérie, il y a l’assurance Amana, partenariat entre la SAA et la MACIF qui offre des assurances rapatriement.

Elle ne fonctionne pas, même si nous convenons qu’elle est abordable. Pratiquement elle ne réussit pas à intéresser la communauté pour plusieurs raisons, entre autres, l’inexistence de représentation de banque algérienne au Canada et les longs délais des virements bancaires entre les deux pays.

Les assurances marocaines ont des représentations bancaires à Montréal. Ce sont elles qui se chargent de tout. Le virement prend 10 minutes ! Les compagnies Pakistan Airlines, Turkish Airlines ou El Al (Israël) transportent gratuitement les dépouilles de leurs ressortissants. Air Algérie nous facture au poids !