A 3.675 kilomètres de Montréal, plus de 300 familles algériennes installées à Calgary vivent une aventure unique fel-ghorba, où, malgré l’isolement, elles résistent aux affres de l’émigration lointaine.

Néanmoins, des membres influents de la communauté travaillent fort pour amortir le choc de la transition: ils ont ainsi fondé une association dont le but est de renforcer la convivialité par la solidarité et l’ambiance que procurent les traditions de notre culture. Le destin ne les aurait jamais réunis s’ils étaient restés dans leur pays d’origine.

Calgary est à trois jours et demi de route de Montréal. C’est une ville prospère, située à l’ouest du Canada, au pied des Rocheuses, dans la province anglophone de l’Alberta. La main-d’oeuvre est rare et les salaires élevés. C’est la quatrième ville en importance économique au Canada et la 3ème place pétrolière au monde après Houston et Londres dans le domaine de l’expertise des hydrocarbures. Lorsqu’il fait très froid l’hiver, les Calgariens s’en remettent au chinook (l’équivalent du sirocco chez nous) pour rétablir l’ordre climatique dans la province. Les personnes contactées par téléphone se sentent bien à Calgary, et la plupart d’entres elles affirment que les conditions de vie sont meilleures qu’ailleurs.

Safi Dib a quitté Tiaret en 2003 pour s’installer à Montréal avec sa femme Nabila et ses quatre enfants. Mais après 18 mois, la routine s’installe: il faut travailler fort pour tenir le coup vu que les revenus sont maigres. Apres concertation dans le couple, la famille lève les voiles et débarque à Calgary avec un enfant en plus, nommé Reyan, né à Montréal. Sa femme Nabila, originaire d’Oran, du boulevard Marceau, eut une heureuse surprise: ses enfants se sont retrouvés dans la même école que les enfants d’une amie d’enfance de la rue Adda Benaouda, qui occupe un poste important en Alberta.

D’après Mme Dib Nabila, qui encourage les nouveaux immigrants à s’installer en Alberta, «tous les Algériens travaillent, contrairement à Montréal, et la plupart sont propriétaires de leur maison». C’est le cas de Me Hassina Younès, arrivée le 6 mai 1997 au Canada en compagnie de son époux et de son fils aîné, âgé aujourd’hui de 13 ans. Dix ans après, la famille s’est agrandie et le couple compte deux enfants de plus âgés de 8 et 7 ans. Mme H. Younès est chirurgienne-dentiste, dont l’équivalence a été évaluée du niveau d’un «bachelor in science», qui, sans expérience canadienne, n’offre pas de possibilité d’emploi. Apres réflexion, se dit-elle, «j’ai décidé de reprendre le chemin des études en 2004 au SAIT (Southern Alberta Institute of Technology), dans le programme du Medical Laboratory». Une fois la formation terminée au mois de février 2006, elle est embauchée 5 jours après l’obtention de son diplôme au poste de Medical Laboratory Tech. par Calgary Laboratory Services. C’est une première étape puisque Hassina Y. compte reprendre les études la prochaine saison pour une durée de deux ans dans l’intention d’obtenir un bachelor in Human Science. Le plus dur est passé pour elle et, pour le moment, en attendant de retourner à l’université, elle s’occupe de ses enfants et travaille à temps partiel.

Mourad Fodil-Chérif est originaire de Gouraya, à l’ouest de Cherchell. Il a quitté l’Algérie en 1974, à l’âge de 20 ans, pour étudier à Sheffield, en Angleterre, où en 5 ans il obtint le diplôme d’ingéniorat en électronique, qui lui ouvre à l’époque les portes d’une merveilleuse aventure dans le monde des mers et des océans.

Après une année à Amman et une autre en Tunisie pour le compte d’une compagnie américaine, il passera plus de 17 ans sur les bateaux scientifiques où il occupera plusieurs postes comme ingénieur spécialisé dans l’acquisition sismique marine.

Une carrière enrichissante avant le retour sur terre. En 1999, M. Fodil-Chérif avait essayé de s’installer en famille en Algérie, sans succès. Il a finalement opté pour Calgary où il vit depuis avril 2000. Haçan Belaouina fait partie de ces Algériens qui ont résidé dans au moins trois des cinq continents: l’Afrique où il est né, l’Europe où il a étudié et l’Amérique du Nord où il réside en famille. Il est originaire de Sidi Maarouf, dans la wilaya de Jijel, qu’il quitta en 1989 pour étudier à l’université de Glascow, en Ecosse.

Apres deux ans d’études, il déménage à Leeds, en Grande-Bretagne, pour préparer un Ph.D en Economie qu’il achève en 1996. A l’époque, l’Algérie était en pleine crise, ce qui l’oblige à partir pour le Canada étant donné que sa demande d’immigration a été acceptée.

La ville de Calgary compte 320 Algériens enregistrés, dont la plupart sont des universitaires formés en Algérie et à l’étranger. En dix ans, la communauté s’est agrandie au point de renforcer l’idée de la création d’une association qui trottait dans la tête de certains depuis plusieurs années. L’idée a fait son chemin et l’association a été mise officiellement sur les rails le 19 juin 2005, en présence d’une centaine d’Algériens. Aujourd’hui, «elle compte 120 membres et plus de soixante sympathisants», selon son président, M. Djamel Madi.

Mourad Fodil-Chérif est le premier président de l’association, avec un groupe d’ami soucieux d’enrichir et de préserver le petit patrimoine culturel des Algériens de Calgary. Ils ont travaillé fort pour doter la communauté d’un organisme communautaire à leur image. Du fait qu’ils soient à l’origine de la création de l’association (AAC), les membres du premier bureau exécutif ont préféré démissionner à la fin de leur premier mandat pour laisser la place aux jeunes, après avoir bâti les fondations de l’AAC et l’avoir fait fonctionner durant l’année 2005-2006, malgré le manque de ressources. C’est un fait rare chez nos compatriotes qu’il faut saluer. Le premier procès-verbal de la réunion du groupe fondateur a été approuvé au domicile de l’actuel président le samedi 24 mars 2005.

A l’époque de sa création, le groupe fondateur était composé de: Djamel Madi, Haçan Belaouina, Krimo Boussenane, Amar Benani, Mourad Fodil-Chérif, Saïd Boudaoui, Hamid Bendahmane, Salem Talbi, Tahar Rahem, Ahmed Djidjelli, Adel Henniche et Yahia Meziane.

Dans le préambule du PV, il est mentionné que « l’idée de création d’une association des Algériens de Calgary n’est pas nouvelle (...). Il est temps pour notre communauté de s’organiser pour créer les conditions à son épanouissement socioculturel et défendre ses intérêts ». Et d’ajouter un peu plus loin, dans la partie critères d’adhésion: « L’ensemble des Algériens et Algériennes résidant dans la grande région de Calgary, y compris ceux ou celles dont les conjoints ne sont pas d’origine algérienne, sont invités à faire partie de l’association ». A condition que chaque membre paie sa cotisation annuelle et accepte la charte de l’association. La première direction de l’Association des Algériens de Calgary a permis à l’association d’émerger des réunions de travail et d’aller vers la concrétisation de projets culturels qui se sont soldés par l’organisation de plusieurs événements: f’tour & sahra de Ramadhan, célébrations de l’Aïd el-Seghir et de l’Aïd el-Kébir, Journée de la femme, BBQ au mois de mai, potluck le 3 juin 2006 avec le Consul général, M. Abdelaziz Sebaa, Assemblée générale le 24 juin 2006, un BBQ le 10 septembre 2006, la sahra de Ramadhan du 30 septembre avec l’Ambassadeur et la soirée/célébration de l’Aïd es-Seghir le 28 octobre. Tout cela a été possible, affirme le président de l’AAC, M. Djamel Madi, « grâce à l’extraordinaire soutien de membres actifs, une trentaine de familles, qui portent à bout de bras l’association ». Et d’ajouter: « En plus des dons en argent, ces membres actifs forment l’essentiel du comité d’organisation et fournissent les gâteaux, des plats traditionnels, du café et du thé à chaque événement ».

Amina Sebaa, l’épouse du Consul général de Montréal, a gardé un bon souvenir de son séjour à Calgary, au point qu’à son retour et à l’occasion du mois de Ramadhan 2006, elle a adressé une chaleureuse lettre aux membres de l’association. « J’ai été très touchée par votre accueil si chaleureux lors du rassemblement/potluck, mais aussi par les qualités humaines telles la solidarité et la générosité de coeur qui caractérisent les nôtres et dont vous faites preuve. J’ai été vraiment impressionnée et fière de votre détermination à réussir dans un environnement si différent de celui de notre origine ». Le 24 juin 2006, lors de la 2ème Assemblée générale, les membres ont fait élire un nouveau bureau exécutif de 5 membres (Djamel A. Madi, président, Djahida Laribi, Saïd Boudaoui, Abderezak Azzouz et Kouider Abbad) et un comité de supervision de 2 membres: Ahmed Djidjelli (président) et M. Adel Henniche.

Source: http://www.lequotidien-oran.com/quot3650/societe.htm