A une semaine du rendez-vous fatidique du 12 février, la commission technique de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) s’est réunie à la Maison des syndicats (Dar El Beïda, à l’est d’Alger) pour faire le point sur les préparatifs de la marche.

Les débats au sein de la commission d’organisation, convient-il de le souligner, ont longuement ballotté, hier, entre le technique et le politique. Et pour cause : les dernières mesures annoncées par Bouteflika méritaient un positionnement clair de la part de la Coordination, ont clamé certains, en suggérant de reformuler les mots d’ordre de la marche, tandis que d’autres ont estimé qu’il ne fallait pas laisser le moindre doute s’immiscer à la suite de ces mesures et qu’il fallait maintenir le cap sur les détails techniques liés à l’organisation de cette importante manifestation de manière à en faire un succès populaire. L’agenda de la CNCD n’a donc pas changé d’un iota : la marche du 12 aura lieu comme prévu. «Le contenu politique de la marche doit être fort. Il faut que le seuil des revendications soit hissé à un niveau important en clamant haut et fort ‘A bas le pouvoir !’ et en réclamant le départ pur et simple du système», a ainsi argué l’intellectuel Fodil Boumala au plus fort d’un débat particulièrement passionné.

La levée de l’état d’urgence, la mesure «star» du pack de «réformettes» proposé par Bouteflika, aura été la plus commentée. Hassan Ferhati de SOS Disparus rappelle la longue expérience des familles de disparus «qui ont toujours tenu leurs rassemblements en bravant l’état d’urgence». Yacine Teguia du MDS fait observer que «la décision la plus importante, c’est de dire que la marche est maintenue. La société bouillonne. Elle s’interroge et a besoin de signaux clairs». D’après lui, «les mesures annoncées ont le même sens et la même fonction que l’état d’urgence lui-même, c’est-à-dire casser la mobilisation de la société et entraver l’activité démocratique. La seule garantie, en définitive, c’est le départ de ce pouvoir !»

Voilà donc le mot d’ordre : «Pouvoir dégage !» Abdelhak Bererhi du CCDR note pour sa part que «s’il y a une volonté réelle de lever l’état d’urgence, cela n’a pas besoin d’une commission. Un décret annule un décret». Pour lui, il est important de peaufiner les points organisationnels de façon à bien cerner l’action du 12 février sur les plans technique et logistique. Maître Fetta Sadat, membre du secrétariat national du RCD, a souligné de son côté que le pouvoir s’est montré «très machiavélique». «Son intention est de court-circuiter cette dynamique populaire et de saper notre travail.» Et de marteler : «Le 12 février n’est pas une fin en soi. C’est le début d’une longue contestation. Nous disons clairement à ce régime : dégage ! Cette coordination ne s’appelle pas ‘coordination du 12 février’ mais ‘coordination pour le changement et la démocratie !’»

Abdelmoumen Khellil de la LADDH rappelle que la levée de l’état d’urgence «est une revendication de longue date de la Ligue». «Mais dans le contexte actuel, cela ne veut rien dire. C’est une manœuvre politicienne.» Rachid Malaoui, du Snapap, très à cheval sur les aspects pratiques, a proposé quant à lui un rassemblement le 9 février devant l’ambassade d’Egypte à Alger en soutien au peuple égyptien.
On l’aura compris : les effets d’annonce du régime n’ont en rien ébranlé la détermination de la CNCD à en découdre avec le système. Notons que jusqu’à présent, la Coordination n’a pas obtenu d’autorisation pour sa marche. Même traitement à Oran où un groupe de la CNCD s’est vu signifier que «seules les zaouïas ont le droit de manifester».     

Source: El Watan