(Johannesburg) On a déjà vu affiche plus alléchante. Algérie-Slovénie, ce n'est pas exactement Argentine-Brésil. Ni France-Italie.

Mais pour les Algériens, le match que les Fennecs livreront dimanche aux Dragons slovènes est tout sauf banal. L'affrontement, à Polokwane, près de la frontière zimbabwéenne, marque la fin d'une longue traversée du désert.

C'est la troisième participation de l'Algérie à la Coupe du monde, mais sa première en un quart de siècle. Au Mexique, en 1986, elle s'était contentée de deux défaites et d'un nul.

L'Algérie a gagné la Coupe d'Afrique des nations (CAN), en 1990. Depuis, rien. Pendant que le pays sombrait dans une guerre civile qui a duré une décennie, l'équipe nationale accumulait les déceptions. Elle n'a jamais dépassé les quarts de finale de la CAN, ne se qualifiant même pas pour la phase finale en 2006 et 2008.

Puis, contre toute attente, en novembre dernier, l'Algérie a obtenu son laissez-passer pour la Coupe du monde. Elle a vaincu son éternel rival, l'Égypte, 1-0 lors d'un match de barrage en terrain neutre, au Soudan. Une qualification à l'arraché qui lui permet de rêver à un retour à sa grandeur d'antan - à l'époque où elle se permettait de faucher des géants. Comme en juin 1982.

Une victoire historique

C'était à Gijon, dans le nord de l'Espagne. Le baptême des Verts en Coupe du monde, contre la puissante équipe ouest-allemande. Les Rummenige, Matthaus et Schumacher ne s'étaient même pas donné la peine de regarder les vidéos de leurs adversaires nord-africains, convaincus de l'absolue supériorité de la Mannschaft. «Les Allemands ont commis une erreur. Ils ont même dit avant le match qu'ils allaient nous battre 7-0», m'a raconté l'attaquant Lakhdar Belloumi lors de son passage récent à Montréal pour un match amical des anciens de 1982.

On devine la suite. Les Algériens ont pris les devants sur un but de l'attaquant Rabah Madjer. Et quand le capitaine allemand, Karl-Heinz Rummenige, a rétabli l'équilibre, la réplique a été immédiate et foudroyante. Il n'a fallu aux Algériens que neuf passes, depuis la reprise du jeu, pour regagner définitivement l'avantage, sur une frappe de Belloumi, copie carbone de celle de Rummenige. «Ils n'ont même pas touché au ballon. Le but devrait être dans le palmarès des plus beaux de l'histoire du Mondial», a dit Belloumi, Ballon d'or africain en 1981.

Cette victoire historique - la première d'un pays africain contre une nation européenne en Coupe du monde - figure en bonne place dans les annales sportives algériennes. «Ça a été un jour historique, comme celui de l'indépendance, 20 ans plus tôt», a dit Belloumi.

Le match de la honte

Les Algériens ne se sont pas arrêtés là. Après une défaite contre l'Autriche, ils sont devenus le premier pays africain à remporter deux victoires au Mondial en triomphant du Chili 3-2. Puis, tout s'est écroulé. Car les Autrichiens et les Allemands ne s'affrontaient que le lendemain dans l'ultime match de groupe. Et ils savaient qu'une victoire des Allemands par un ou deux buts suffirait à qualifier leurs deux pays aux dépens de l'Algérie.

Ce qui devait arriver arriva: les Allemands ont pris rapidement les devants, puis les deux équipes ont passé les 80 dernières minutes du match à s'échanger le ballon, sans même faire semblant d'essayer de marquer. «Le jour le plus honteux de l'histoire de la fédération de football du pays», a commenté la télé allemande à propos de cette triste exhibition. Belloumi n'a pas pardonné. «Le match de la honte», résume-t-il.

L'opprobre général - certains ont parlé de nouvel Anschlüss, en référence à l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne nazie, en 1938 - n'a rien changé pour l'Algérie, sortie du tournoi malgré ses deux victoires. Mince consolation, l'affaire a forcé la FIFA à modifier ses règles: depuis, les derniers matchs de groupe ont lieu simultanément, pour éviter les arrangements douteux.

Vingt-huit ans plus tard, l'Algérie obtient une nouvelle chance de s'illustrer au Mondial. «C'est un retour sur le devant de la scène, que l'Algérie a quitté trop longtemps, après avoir maintenu un niveau très élevé dans les années 80. Dommage qu'on ait périclité de cette façon. C'était une époque extraordinaire, qu'on espère renouveler», a dit le capitaine de la sélection algérienne de 1982, Ali Fergani, qui était aussi à Montréal.

Pour guider la formation algérienne, formée pour l'essentiel de joueurs de la diaspora, le pays a fait appel au vétéran sélectionneur Rabah Saadane, adjoint en 1982 et entraîneur titulaire en 1986. Un choix éclairé: il a conduit l'équipe à la demi-finale de la CAN 2010, en Angola, cet hiver.

«Il y a du tempérament et de la qualité dans cette équipe, mais elle manque d'homogénéité», a dit Fergani. Dans un groupe où l'Angleterre et les États-Unis partent avec une longueur d'avance, cela pourrait bien être fatal pour l'espoir de l'Algérie d'atteindre finalement le second tour.

Source: CYBERPRESSE.CA