Durant les cinq dernières années et dans des conditions difficiles liées à l’ambiguïté de son rôle et à l’absence de considération pour ses travaux par les cabinets politiques successifs du ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles,....

Durant les cinq dernières années et dans des conditions difficiles liées à l’ambiguïté de son rôle et à l’absence de considération pour ses travaux par les cabinets politiques successifs du ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles, la Table de concertation Maghreb du Ministère de l’immigration et des Communautés culturelles (MICC) a tout de même produit des livrables consistants, tant à travers son plan d’action que par les recommandations issues du 1er colloque de l’intégration des Maghrébins. Cela sans compter les différents documents et contributions fournis par l’ensemble des participants sur divers sujets qui concernent l’intégration des immigrants en général et des Maghrébins en particulier.

Je considère donc que la mission de la Table de concertation Maghreb du Ministère de l’immigration et des Communautés culturelles a été menée à bien et pleinement remplie. Malheureusement, ses recommandations sont restées sans suite, malgré les engagements pris, y compris par la précédente ministre de l’Immigration et des Communautés culturelles à plusieurs reprises comme à l’issue dudit colloque, lors d’autres rencontres et durant les audiences de la Commission parlementaire sur le racisme.

Force est de faire le constat déplorable d’un manque évident de volonté politique de la part du gouvernement québécois de trouver les solutions qu’il faut en vue de l’intégration par le travail des immigrants d’une façon efficace dans l’intérêt du Québec comme dans celui des membres de communautés culturelles, particulièrement les Maghrébins dont le taux de chômage est passé en quelques années d’un inacceptable 18% à un désastreux 30%, proportion largement supérieure à celle des pays d’origine! L’espoir de voir les recommandations de la Table mises en œuvre en tout ou en partie a donc fait place à un constat d’échec porteur de vives inquiétudes quant à l’avenir des Québécois d’origine maghrébine en particulier, et au vivre-ensemble en général.

Dès lors, je ne vois plus mon rôle dans cette Table de concertation que comme figurant et témoin impuissant (complice?) de la dégradation d’une situation censée s’améliorer, rôle que je me refuse désormais à jouer. Continuer à y siéger serait non seulement contraire à ma conscience, mais aussi une perte de temps et d’énergie que je dois investir désormais ailleurs et non pour l’image d’un gouvernement qui ignore la détresse d’une partie de ses propres citoyens…à moins que la minorité maghrébine soit considérée comme relevant d’une sous-citoyenneté…

Nos différentes tentatives pour essayer de tirer la sonnette d’alarme sur la gravité de la situation concernant le chômage des Maghrébins du Québec n’a trouvé aucun écho, le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles et le gouvernement dans son ensemble se retranchant derrière le seul registre du discours intégrateur non dénué de démagogie, loin des solutions concrètes et urgentes. Cette insensibilité à l’ampleur du phénomène du chômage et des ses implications socioéconomiques et psychologiques est aussi inquiétante que choquante. À chaque sonnette d’alarme tirée par nos soins, la réponse aura été : «nous comprenons vos frustrations!», voire «vos frustrations personnelles!» (voir réaction de la ministre de l’Immigration et des Communautés culturelles lors de la présentation de notre mémoire, M. Rachid Raffa et moi même, à la Commission parlementaire sur le racisme). Il est clair qu’il s’agit de comprendre non pas les frustrations, mais les doléances légitimes et le cri du cœur de plus de 30% de chômeurs (plus de 30% en considérant toutes les tranches d’âge, ce dont les statistiques publiées ne rendent pas compte) et, parmi les 70% qui travaillent, d’une proportion importante de personnes déqualifiées au regard de leur niveau éducatif élevé et de leur maîtrise de la langue française à laquelle ils apportent une contribution décisive quant à sa survie au Québec.

Une fois le choc passé, les dernières données de Statistique Canada nous ont donné l’espoir que le gouvernement allait enfin prendre le problème à bras-le-corps d’une façon décisive et sérieuse…Mais ce n’est qu’illusion et profonde déception suite à la réunion du 4 mars 2008 de la Table de concertation Maghreb du Ministère de l’immigration et des Communautés culturelles, ce qui fait que je regrette de n’avoir pas suivi immédiatement la résolution de M. Rachid Raffa de quitter cette instance puisque, lors de cette réunion, aucune action concrète pour faire face au taux de chômage inacceptable des Maghrébins du Québec n’a été proposée ni par le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles, ni par les autres représentants du gouvernement québécois

Par conséquent, je considère que continuer à participer à cette la Table Maghreb du ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles c’est légitimer un processus qui a démontré ses limites et qui n’a fait et ne fera que masquer le manque de volonté politique du gouvernement du Québec de prendre réellement et efficacement en charge l’intégration par l’emploi des immigrants en général et des Maghrébins en particulier, mettant ainsi en péril la stabilité sociale et économique de notre pays commun, le Québec.

Lamine Foura, 5 mars 2008
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