Utiliser le sexe pour faire chanter une victime constitue une des arnaques de l'heure en matière d'hameçonnage informatique. Plusieurs corps policiers s'inquiètent d'une récente recrudescence des cas.

Des dizaines de victimes de sextorsion - toutes des hommes - ont été recensées ces derniers mois dans la grande région montréalaise, selon les policiers de plusieurs territoires interrogés. Il s'agirait selon eux d'une infime fraction des fraudes commises.

L'escroquerie est simple: vous rencontrez une jeune et jolie femme sur des sites de rencontre, notamment le site populaire Badoo et même Facebook. Elle vous invite alors à poursuivre la conversation dans l'intimité, devant des webcams sur des plates-formes comme MSN ou Skype. Les échanges virtuels dévient rapidement vers le sexe. La jeune femme commence alors un striptease ou entreprend de se caresser en vous encourageant à en faire autant. Après quelques minutes, surprise! La jeune femme vous apprend que vous venez d'être filmé à votre insu. On vous ordonne d'aller sur le champ verser de l'argent via des entreprises de transfert de fonds comme Western Union ou Moneygram, faute de quoi on menace de partager la vidéo compromettante sur des sites comme YouTube, de même qu'à vos contacts de divers réseaux sociaux comme Facebook.

La piste des responsables de cette arnaque informatique remonte à la Côte d'Ivoire (dans la ville d'Abidjan), là où les victimes doivent envoyer l'argent extorqué. Ils sont pratiquement impossibles à épingler et les policiers doivent se résigner à un rôle préventif.

Quelques adresses IP d'ordinateurs utilisés par des jeunes femmes ont pour leur part été découvertes en France et en Belgique.

Les échanges avec les victimes québécoises se font au clavier seulement et en français.

Les policiers sont par ailleurs unanimes: les filles utilisées pour appâter les victimes ne sont qu'un maillon d'un réseau plus vaste, structuré et surtout lucratif. Seulement sur le territoire de Laval, où 13 dossiers ont été répertoriés depuis décembre, les montants extorqués varient de 150 $ à 3800 $. Les sommes sont d'abord exigées en euros, avant d'être révisées en devises canadiennes.

Pour toucher de l'argent, les escrocs semblent même prêts à négocier, constate le sergent Franco Di Genova, de la police de Laval. «Une de nos victimes s'est fait demander 500 $, il a plaidé n'avoir que 150 $, le montant finalement envoyé.»

Les victimes recensées à Laval se sont fait arnaquer entre le 19 décembre et le 21 mai derniers. Elles ont de 20 ans à 73 ans, mais la plupart sont dans la vingtaine. Deux d'entre elles ont envoyé paître les fraudeurs. La police ignore si les extorqueurs ont mis leur menace à exécution.

À l'échelle mondiale, le fléau est tel que même le FBI a récemment lancé un message de prévention sur son site. «Les victimes se font aussi pirater leur ordinateur, puisque les escrocs énumèrent les noms de leurs proches, à qui on menace d'envoyer la vidéo embarrassante, explique le sergent. Nos enquêteurs disent que ce n'est que la pointe de l'iceberg. Que les victimes peuvent être trop gênées pour porter plainte à la police».
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