La double agression contre notre ambassade à Rabat et notre consulat à Casablanca remet sur le tapis la question des relations intermaghrébines et surtout l’avenir de l’UMA.

Les Algériens considèrent que l’atteinte à notre drapeau national, surtout un 1er novembre, n’est pas un acte isolé. On sait en effet que rien ne peut bouger au Maroc sans l’aval du palais royal. C’est même ce dernier qui a orchestré toute l’opération.
Dans un discours prononcé le 11 octobre dernier devant les deux Chambres réunies, le roi Mohammed VI a clairement donné le feu vert au passage à l’action : «Au lieu d’attendre les attaques de nos adversaires pour riposter, il faut plutôt les acculer à la défensive en prenant les devants, en anticipant les événements et en y répondant de manière positive», ajoutant plus loin : «Par conséquent je vous exhorte tous, encore une fois, à une forte mobilisation, une vigilance de tous les instants et des initiatives efficaces aux niveaux interne et externe pour contrecarrer les ennemis de la nation où qu’ils se trouvent et pour déjouer les stratagèmes illégitimes auxquels ils ont recours.»

Dans la bouche du jeune roi, «les ennemis de la nation» ne sont autres que les Algériens. D’ailleurs, depuis son accession au trône, il a développé un discours extrêmement agressif contre l’Algérie, un discours qui, au lieu d’inciter à l’apaisement, pousse au contraire à créer un climat de tension. Un comportement qui, malheureusement, a grandement contribué à l’affaiblissement de l’UMA à laquelle, au demeurant, le monarque alaouite ne croit pas du tout. Qu’on en juge. Depuis sa création en février 1989 à Marrakech, les pays membres ont signé entre eux seulement 37 traités et accords. Or, l’Algérie en a ratifié 29, la Tunisie 28, la Libye 27, la Mauritanie 25 et le Maroc seulement 8. Ce sont là des chiffres qui soulignent clairement le désintérêt du royaume pour la construction maghrébine. Il est surtout en train de vivre avec un rêve moyenâgeux : le grand Maroc et son corollaire, l’expansionnisme colonial. Dans une première étape, il a envahi le Sahara occidental. Heureusement que le peuple sahraoui l’a freiné dans son élan, sinon il se serait lancé à la conquête de la Mauritanie, du nord du Mali et, bien entendu, «les provinces sahariennes spoliées par l’Algérie». Une logique qui, heureusement, est condamnée par le monde entier, sinon, de remise en cause en remise en cause, les pays européens seraient jusqu’à ce jour en train de s’entretuer au nom des «frontières historiques».

Le régime de Rabat doit faire son choix et définitivement. Veut-il le «grand Maroc» ou le «grand Maghreb» ? C’est une option existentielle qui conditionne son devenir et qu’il doit préciser, dit-on de source diplomatique. Les deux sont antinomiques, incompatibles, impossibles à concilier. C’est demain l’anniversaire de la «marche verte». Le roi va-t-il continuer dans l’irresponsabilité ou va-t-il faire enfin preuve d’ouverture et de respect des lois internationales ? S’il prononce un discours de la tonalité de celui du 11 octobre, il ne faudra plus espérer grand-chose. L’espoir mourra. Il reste une chose que doivent dire les dirigeants algériens à leur peuple : le projet maghrébin est dans une impasse historique et le Maroc en assume seul la responsabilité. En tant que Maghreb central, nous disent des sources diplomatiques, le seul pays maghrébin à avoir des frontières avec les autres maghrébins, y compris le peuple sahraoui, et à ce titre appelé à faire le plus de sacrifices en ressources pour impulser la construction maghrébine, de ce fait, l’Algérie doit dire la vérité à son peuple et aux autres peuples maghrébins.

L’expansionnisme marocain a pris en otage le grand Maghreb, ajoute la même source. Jusqu’à quand ? L’alternative est claire et tous les Maghrébins de bonne foi et de bonne volonté ne peuvent que la comprendre, sinon la soutenir : faisons le Maghreb avec ceux qui sont prêts.
Le double crime perpétré le 1er novembre contre le consulat d’Algérie à Casablanca, à travers l’invasion d’une structure diplomatique internationale et la profanation du drapeau national algérien est aussi et surtout un crime historique contre le Maghreb, souligne notre source. L’Algérie ne peut pas continuer à faire preuve de retenue quand l’arrogance du gouvernement marocain n’a pas de limite. Il ne s’agit pas seulement d’un incident diplomatique en contrôlant ses dommages collatéraux, ajoute encore notre source, car il s’agit de l’avenir de tous les peuples maghrébins. Il faut enlever au régime marocain cette illusion que grâce à ses soutiens français, il pourra être une sorte d’Israël dans la région et qu’il serait au-dessus du droit international en ignorant les aspirations de ses peuples, conclut notre interlocuteur.

Source: El Watan