Il devra mener à terme l’opération mains propres ou l’assainissement de la compagnie nationale pétrolière sans gros dégâts sur l’Algérie et en finir avec la paralysie de Sonatrach.



La nomination de Youcef Yousfi ministre de l’Énergie et des Mines est le fruit d’un compromis dans les hautes sphères du pouvoir, avancent des sources concordantes. Il est clair que le président Bouteflika a lâché Chakib Khelil pour ses responsabilités dans le scandale Sonatrach. Ahmed Ouyahia, le Premier ministre,       aura influé de tout son poids dans ce changement, ajoutent-elles.
En fait, ce retour à la tête du secteur de l’Énergie, le nouveau titulaire du poste le doit à son capital expérience dans la branche, sa proximité avec les décideurs et un parcours politique et diplomatique sans fautes.

En effet, ce natif de Batna est titulaire d’un doctorat en chimie obtenu en France. Après avoir été enseignant à l’Université dans les années 1970, il devient directeur des industries pétrochimiques au ministère de l’Énergie au temps de Bélaïd Abdesselam. En 1979, il est nommé vice-président à Sonatrach, chargé de la commercialisation. Surprenant, il avait dans son équipe Bouhafs, l’ex-PDG de Sonatrach, et Ali Hached, le conseiller du ministre. Youcef Yousfi devient DG de la compagnie pétrolière nationale en 1984. Il occupera ce poste pendant 5 ans. Au cours de cette période, il a négocié entre autres les contrats de vente de gaz algérien aux États-Unis. Anecdote, il reçoit à cette époque le patron de la compagnie allemande Ruhrgas qui lui dit : “Je vous propose une offre intéressante (achat de gaz). Youcef Yousfi se met en colère. Il le renvoie du bureau. Car la marge proposée pour l’Algérie était ridicule (64 cents par million de BTU), raconte un ancien collaborateur. En 1988, Youcef Yousfi est nommé président du Fonds de participation énergie. Au début des années 1990, il est conseiller du ministre qatari de l’énergie et consultant à Qatargas.

L’Algérie a-t-elle perdu le marché allemand ?
En 1995, à la nomination de Liamine Zeroual comme président de la République, il est nommé directeur de cabinet du chef de l’État. “Aspect méconnu de sa carrière, il a contribué avec Ahmed Ouyahia à la création du RND”, confie une source sûre. De 1997 à 1999, Youcef Yousfi est à la tête du ministère de l’Énergie. “C’est la première fois dans l’histoire du pays qu’un ministre de l’Énergie passe le relais au même ministre qu’il a remplacé en 2000”, ajoute la même source. (Cérémonie de passation dimanche dernier). Au cours du premier mandat du président Bouteflika, Youcef Yousfi détient le portefeuille de ministre des Affaires étrangères jusqu’en 2001. Par la suite, on lui confie le poste d’ambassadeur au Canada, puis représentant de l’Algérie aux Nations unies et enfin ambassadeur à Tunis avant de remplacer Chakib Khelil à l’Énergie.

“C’est un bon signal envoyé à l’extérieur. C’est un bon compromis. Youcef Yousfi est un responsable que l’industrie des hydrocarbures connaît. Il a été déjà ministre de l’Énergie. Il est apprécié par les cadres de Sonatrach”, confie  un ancien responsable du secteur. Au cours de sa carrière, Youcef Yousfi s’est taillé la réputation de travailleur acharné. Et il fait travailler durement ses collaborateurs.

La main à la création du RND
Mais sa tâche sera difficile. Les dossiers s’avèrent très lourds. Ce passionné de pétrochimie reconverti en médecin au chevet de Sonatrach, malade de l’affaire Meziane, devra mener à terme l’opération d’assainissement à Sonatrach. Des cadres trempés jusqu’au cou dans des affaires de malversations continuent à travailler au sein de la compagnie. Parmi ses chantiers à  court terme, il devra reprendre en main rapidement la compagnie et rompre avec cette période d’indécision, au total près de cinq mois de paralysie. Il convient également de rassurer les cadres de Sonatrach et les partenaires à l’étranger. “Ces derniers connaissent bien Sonatrach. Ils savent que c’est juste une courte période de turbulences. Et que la compagnie nationale va sortir  de la crise renforcée”, nuance un ancien responsable de Sonatrach. Autre chantier : améliorer la gouvernance de Sonatrach dont les défaillances sont à l’origine du scandale Sonatrach. “Mais il y a eu tellement de dégâts. Le top management constitué de cadres compétents a été décapité durant l’ère Khelil. Il convient de rappeler ces cadres éjectés”, ajoute un autre responsable. Quant aux relations du “pétrochimiste” avec le nouveau patron de Sonatrach, c’est l’incertitude. On sera plus fixé dans les prochaines semaines, voire les prochains mois.

À noter qu’un décret vient de paraître confirmant Noureddine Chérouati comme P-DG de Sonatrach ainsi que les quatre vice-présidents de la compagnie récemment nommés. Le premier n’est pas un relais de Chakib Khelil, assurent des sources concordantes. Les quatre vice-présidents sont quasiment tous issus de Sonatrach. Saïd Sahnoun, le vice-président amont cumule une riche expérience opérationnelle ; il a été directeur de la région de Hassi R’mel, responsable du groupement BP-Sonatrach, puis directeur des associations. Yasmina Hamdi, désignée vice-présidente chargée de la commercialisation, est une élève d’Ali Hached qui était le plus apte à succéder à Mohamed Meziane, qualifiée de fine connaisseuse des enjeux du marché international du gaz. Abdelkader Benchouia, le vice-président aval cumule une longue expérience dans le raffinage.

Directeur de la raffinerie de Skikda, la plus grosse installation du pays, il est nommé par la suite P-DG de Naftec, la filiale de Sonatrach spécialisée dans le raffinage avant d’occuper le poste de premier responsable de la division raffinage à Sonatrach. Allaoua Saïdani, le vice-président de l’activité transport par canalisations, est issu de Sonelgaz. Il était président de la filiale gestionnaire des réseaux de transport de gaz à Sonelgaz. “Ce sont des responsables compétents”, assure un ancien cadre à Sonatrach.

Source: LIBERTE-ALGERIE.COM