L’Algérienne Lynda Thalie sera la rose du Petit Prince

Du 6 au 11 mai 2003, à Montréal, et pendant une semaine à la fin du mois de juin à la ville de Québec, les arts canadiens de la scène vibreront au rythme du «Petit prince», un spectacle musical version québécoise inspiré du chef d’oeuvre d’Antoine de Saint-Exupéry.

Le seul rôle féminin du spectacle, celui de la rose, a été confié à Lynda Thalie au grand bonheur de la communauté algérienne du Canada et des mélomanes séduits par le talent de la jeune artiste originaire d’Algérie. Âgée de 24 ans, Lynda Thalie vit au Canada depuis une dizaine d’années. Auteur-compositeur-interprète, elle fut lauréate de la catégorie «Interprète» au concours «Ma première Place des Arts» où elle a, par ailleurs, remporté le prix Distinction et le prix Radio-Canada. Elle s’est révélée au grand public grâce à «Sablier», son premier (et unique pour le moment) album, qui lui permis, l’année dernière, de briller à Montréal -entre autres- à l’occasion du Festival du Monde arabe. En septembre 2001, elle a interprété «Imagine» de John Lenon en compagnie de Luck Mervil dans le cadre d’un spectacle intitulé Québec-New York.

Les médias québécois ont chaleureusement accueilli ses chansons et n’ont pas manqué de souligner que l’art de Lynda Thalie est une sorte d’hybridation exquise des genres musicaux nord- africain et nord-américain. Sur son site internet (http://www.lyndathalie.com/), on peut lire que ses influences musicales «sont variées, allant de Warda à Madonna, Khaled, Cheb Mami ou Olive». Cependant, ces influences ne rendent pas justice à l’artiste car elles ne traduisent pas convenablement son originalité, sa marque propre, sa touche personnelle. Et si la comparaison avec une autre artiste devait absolument être établie, c’est plutôt vers une chanteuse comme Sade qu’il faudrait se tourner. C’est ce qui ressort en tout cas de l’écoute attentive de son album. Même délicatesse, même sérénité, même charge émotive.

Le mérite de Lynda Thalie n’est pas moindre eu égard aux exigences d’un spectacle musical qui se veut fidèle autant que possible au conte de Saint-Exupéry. Car «Le petit prince» est une oeuvre complexe, qui partage avec d’autres chefs d’oeuvre de la littérature, par exemple «Récits de notre quartier» de Naguib Mahfouz ou «Kallila oua Dimna» de Ibn El-Mouqafaâ ou encore «Le vieil homme et la mère» d’Ernest Hemingway, la force d’une subtilité hors du commun. Celle d’une savante alchimie entre d’une part, la naïveté de surface qui rend l’oeuvre accessible aux plus jeunes lecteurs et d’autre part, la profondeur d’un souci tout philosophique à l’égard de la condition humaine. C’est précisément cette sensibilité que les interprètes auront à traduire sur scène. Voilà pourquoi le nouveau défi de Lynda Thalie est considérable.

Le spectacle comporte 24 titres écrits par Richard Cocciante et Elisabeth Anaïs. Cocciante est le compositeur qui a étroitement collaboré entre 1995 et 1998 avec Luc Plamondon dans l’adaptation de «Notre Dame de Paris» avec le succès phénoménal que l’on sait. Les deux artistes se sont ensuite brouillés. L’automne dernier à Paris, chacun s’est lancé individuellement avec un spectacle musical. «Cindy» pour Plamondon qui a repris le conte de Sandrion et «Le petit prince» pour Cocciante. Mais il n’a pas fallu longtemps pour que «Cindy» s’arrête en cours de route faute de succès auprès du public alors que «Le petit prince» sera représenté en France jusqu’au mois de mai.

Reste qu’avec le triomphe de «Notre-Dame de Paris» la barre du succès des spectacles musicaux a été placée très haut. C’est donc dire à quel point est forte la pression que doivent subirent les artistes. Mais cela ne doit pas faire perdre de vue le fait incontestable que chaque oeuvre a sa spécificité et que, tenir tel ou tel spectacle, pour l’étalon de mesure du succès et de la qualité esthétique d’un autre spectacle, demeure un exercice arbitraire et ne repose sur aucun argument objectif. Dans le cas du «Petit prince», la qualité doit être mesurée en fonction de la nature propre à l’oeuvre, ses exigences et ses contraintes. C’est ce que Cocciante semble avoir bien compris, lui qui a récemment déclaré à la presse : «Le petit prince est sobre, intérieur, plus difficile à réussir. Il y avait toujours une ligne à ne pas franchir pour rester léger sans être enfantin.»

Source: http://www.quotidien-oran.com/quot2448/culture.htm