Les dernières déclarations du sélectionneur, Rabah Saâdane, sur la participation de l’Algérie à la CAN 2010 n’incitent pas à l’optimisme. C’est le moins que l’on puisse dire. Au moment où les Algériens attendent avec impatience le retour des Verts dans cette prestigieuse compétition continentale, le sélectionneur prend tout le monde à contre-pied et annonce à l’APS, hier avant le départ des joueurs locaux pour Toulon : « Cette compétition arrive au mauvais moment pour l’équipe. Nous sortons fatigués des éliminatoires, chose qui me pousse à dire que le peuple ne devra pas s’attendre à des miracles dans ce tournoi. Mais nous tâcherons de gérer match par match avec l’objectif d’aller le plus loin possible. »

 



Ces propos, tenus à quelques jours de l’ouverture du tournoi en Angola, auront tendance à refroidir l’ambiance générale dans laquelle baignent les supporters algériens depuis la victoire face à l’Egypte à Khartoum. Nul doute que le coach national reste le mieux placé, au plan technique, pour avancer une analyse de ce qui attend notre équipe en Angola. De par sa longue expérience, et compétence aussi, Rabah Saâdane est plus à même d’entrevoir ce qui va arriver en janvier contre le Malawi, le Mali et l’Angola. Il a fait des campagnes 1africaines et sait parfaitement ce qui attend toutes les équipes sur place. Et c’est là où ses propos, « cette compétition arrive au mauvais moment pour l’équipe ... », détonnent. Mis à part le pays organisateur, toutes les sélections qualifiées sont passées par le harassant parcours des trois et deux tours éliminatoires combinées des deux compétitions (CAN et Coupe du monde).

La fatigue cumulée durant les longs mois de la compétition est la même pour tous. Est-ce à dire qu’il y a un autre mobile que Rabah Saâdane évite soigneusement d’évoquer, du moins publiquement, et qui serait à l’origine de cette sortie médiatique ? En effet, rien n’est à exclure. Surtout lorsqu’on prend connaissance de la suite des propos de Rabah Saâdane, qui indique à l’APS : « Personnellement, je suis fatigué et saturé après une campagne qualificative longue et éprouvante. J’aurais aimé ne pas être en Angola, mais je suis obligé d’assumer entièrement mes responsabilités à l’occasion de ce tournoi qui s’annonce très difficile. » Cette déclaration a de quoi inquiéter. Elle démobilise plus qu’elle ne mobilise. Elle passe mal. Surtout vis-à-vis des joueurs, des compétiteurs, préparés à « avaler » les compétitions et les challenges qui se présentent sur leur chemin.

Rabah Saâdane a raison lorsqu’il souligne : « Il est difficile sur le plan méthodologique du travail de dégager une équipe solide et compétitive, surtout que cet événement continental intervient au milieu de la saison, et de garder la même dynamique affichée par l’équipe, notamment lors du dernier tour des éliminatoires. » Mais est-ce que ces arguments peuvent à eux seuls justifier ses états d’âme : « Je suis fatigué, saturé... J’aurais aimé ne pas être en Angola... », martelés la veille du début de stage en France, et juste avant la dernière ligne droite avant le début de la CAN 2010 ? Comme toujours, la question va diviser. La position exprimée par le sélectionneur national ne se limite certainement pas aux seules motivations évoquées par le patron des Verts. Il y a d’autres enjeux, comme par exemple le renouvellement de son contrat par son employeur, la FAF qui ne l’a pas encore fait.

Rabah Saâdane, comme tout autre sélectionneur dans son cas, attend peut-être que la Fédération prenne l’initiative de lui proposer le renouvellement de son contrat, signé avec l’ancien président de la FAF, Hamid Haddadj, qui arrivera à expiration en juillet 2010. C’est à dire au lendemain de la Coupe du monde 2010. Habituellement, lorsqu’un entraîneur signe un contrat d’objéctif, c’est le cas, et qu’il le remplit, c’est le cas, il est automatiquement reconduit. Presque tous les sélectionneurs qui ont qualifié leur pays à la Coupe du monde ont reçu une proposition de reconduction. Pas Rabah Saâdane. Si la FAF ne l’a pas fait, c’est qu’elle a ses raisons et elle n’est pas obligée de les dévoiler au moins jusqu’au moment opportun.

Il y a quelques jours, Rabah Saâdane, avait déclaré sur les colonnes de notre confrère Compétition : « Je quitte l’équipe nationale après la Coupe du monde 2010 », sans que cela n’ai entraîné une quelconque réaction de la Fédération. A priori, la FAF ne semble pas pressée de discuter ce point. Il n’est pas exclu que les deux parties prendront rendez-vous après la CAN en Angola pour se pencher sur leur relation à l’aube des futures échéances, CAN 2010 et Coupe du monde 2014. A la lumière des déclarations de Rabah Saâdane, et du silence observé par la FAF sur le sujet, il y aura du nouveau bientôt. Les deux parties ne peuvent pas cohabiter longtemps avec leur état d’esprit réciproque. Une des deux se rangera sur la volonté de l’autre. Entre-temps, les dégâts risquent d’être importants. Les joueurs ont besoin de se sentir protéger, d’être boostés et aller de l’avant, accompagnés par un élan de solidarité collectif comme ils l’ont vécu à Khartoum.

La CAN est une compétition impitoyable. Ne s’en sortent indemnes que les équipes fortes mentalement, bien préparées psychologiquement et bien armées au double plan technique et physique. A ce niveau, aucune faiblesse (morale, physique ou technique) n’est tolérée. La CAN n’est plus un voyage touristique où des joueurs de renom n’ont besoin que d’apparaître pour brandir le trophée. Cette époque est révolue. Les compétiteurs (joueurs) débarquent à la CAN avec un seul objéctif : remporter la compétition. La suite, personne ne peut la prévoir. Des ténors trébucheront, certainement. Des équipes qu’on n’attendait pas peuvent créer la surprise. La CAN, c’est tout cela. Ceux qui ne se sentent pas forts, prêts à relever tous les défis ne doivent pas y aller. Pour le reste, le ballon est rond, il roule sur le gazon et personne ne peut savoir à l’avance au profit de qui !

 

Source: El Watan Edition du 27 decembre 2009