La crise économique qui a accompagné la pandémie a touché plus durement et plus longuement les femmes, au point où elle a été rebaptisée de récession au féminin.

La crise économique qui a accompagné la pandémie au Canada a touché plus durement et plus longuement les femmes, au point où elle a été qualifiée de récession au féminin. Les plans de relance ne semblent pas prendre la mesure de cette particularité, de l'avis de nombreux experts.

L’entrevue avec Manel Rais, toute nouvelle résidente de Calgary, n’aura duré que 15 minutes, mais elle avoue que cela a été une bouffée d’oxygène. Depuis son arrivée au Canada, l’Algérienne n’a pas eu un moment de répit sans son fils. 

Manel Rais, mère célibataire, a débarqué juste avant la fermeture des frontières. En quelques jours, toutes les garderies et les écoles de Calgary ont fermé leurs portes. Son enfant de 7 ans s’est retrouvé sans moyen d’intégration, et elle, sans possibilité de trouver un travail. 

Je voulais faire une formation, je me suis renseignée, mais, malheureusement, je suis tombée dans un autre problème : je suis seule avec mon fils, les garderies sont fermées et je ne connais personne , explique la jeune femme. 

Pas de garde d'enfant, pas d'emploi

Sans école, sans camp de jour et sans soutien familial, Manel Rais ne peut travailler ni entreprendre les démarches pour la recherche d’un emploi. Une situation qui risque vite de devenir intenable. J’ai ramené une somme d’argent avec moi, mais ce n’est pas évident, je dois trouver un boulot, s’inquiète-t-elle.

Manel Rais n’est, bien sûr, pas seule dans cette situation. À plusieurs centaines de kilomètres, à Victoria, en Colombie-Britannique, Mélissa Mailloux fait face au même dilemme, ou plutôt à l’absence de choix. 

Agente de bord à Air Canada Express, la jeune femme s’est vu offrir de reprendre le travail au début du mois de juillet, mais elle a dû décliner cette offre. Avec le nombre de vols annulés, elle risquait de perdre plus d’argent que d’en gagner et personne n’aurait pu garder la fille de 6 ans de son compagnon. Si l’école ne recommence pas, je suppose que je vais quitter mon emploi [...] À ce point-ci, ce n’est pas vraiment un choix, ce n’est pas vraiment une option. Il faut faire ce qu’il faut faire , conclut-elle.

La She-cession

Les situations se multiplient à travers le pays par dizaines. La crise économique a même été rebaptisée She-cession en anglais, ou récession au féminin.

Normalement, dans une récession traditionnelle, la perte d’emploi se fait dans des secteurs qui sont masculins comme la construction ou l’industrie manufacturière. Ici, les secteurs les plus touchés sont le secteur hôtelier, les loisirs et l’éducation, explique Daphné Baldassari, chercheuse associée à l’Institute for Gender and the Economy, à l’Université de Toronto. La disparition des services de garde a fait aussi que les femmes ont dû prendre ce fardeau considérable et doivent travailler à la maison, ce qui représente environ 10 heures de travail supplémentaires.

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