MONTRÉAL – Plus de 1000 Algériens de Montréal sont descendus dans les rues de la métropole samedi pour souligner le premier anniversaire du large mouvement de contestation dans leur pays d’origine.

C’était en février 2019. Le président Abdelaziz Bouteflika, octogénaire à la santé chancelante au pouvoir depuis 1999, venait d’annoncer qu’il allait solliciter un cinquième mandat. Pour le peuple algérien, ça aura été la goutte qui a fait déborder le vase. Dans les jours qui allaient suivre, le pays allait être le théâtre de manifestations monstres en opposition au régime.

Depuis, la «révolution du sourire» – surnommée ainsi parce que la contestation est toujours restée pacifique – a mené au départ de Bouteflika, puis à l’élection – contestée – d’un nouveau président. Or, la grogne persiste.

«Il y a encore des détenus en prison parce qu’ils ont dit leur opinion. On a des militaires qui veulent instaurer leur pouvoir. On n’a pas un système qui vit pour le peuple, on a un peuple qui vit encore pour son système», a dénoncé Ahmed Helali, qui, chaque fin de semaine depuis un an, se réunit avec d’autres membres de la communauté, en soutien aux manifestants en Algérie.

Il est prêt à garder cette habitude encore pendant plusieurs années, jusqu’à tant que de réelles élections libres soient organisées dans son pays natal.

Un rôle à jouer

À des milliers de kilomètres de l’agitation des rues d’Alger et d’Oran, la diaspora algérienne de Montréal a tout de même un rôle à jouer pour la suite des choses, assure Jihed Halimi, qui manifeste lui aussi tous les samedis devant le consulat d’Algérie, à Montréal.

«C’est une manière de remonter le moral, mais aussi de faire profiter de notre expérience québécoise pour montrer comment l’Algérie peut évoluer. Le Québec des années 50 n’est pas différent de l’Algérie d’aujourd’hui: les élections sont truquées, la religion contrôle tout et les femmes ont peu de droits», a-t-il expliqué.

Un mouvement qui reste uni

La situation des femmes en Algérie, c’est entre autres ce qui a poussé Aicha Boudraa à mettre entre parenthèses l’étude pour ses examens de génie, samedi, pour venir manifester.

Contrairement à la révolution de 1979 en Iran ou au printemps arabe en Égypte, elle ne craint pas que la révolte populaire soit récupérée par la mouvance islamiste, qui demeure importante en Algérie, même après la guerre civile des années 90.

«Le régime nous fait continuellement peur avec ça, en nous disant qu’on pourrait resombrer dans les heures les plus sombres de notre histoire, mais aujourd’hui on prouve qu’on est un peuple qui est assez mature politiquement pour assumer ses responsabilités», a soutenu Aicha Boudraa, portant fièrement le drapeau algérien sur elle.

Samedi à Montréal, le drapeau vert et blanc orné du croissant rouge flottait aux côtés de celui de la minorité berbère, une scène impensable en Algérie où cet emblème a été interdit par le régime lors des manifestations.

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