La chasse aux femmes voilées a débuté. Les images de Musulmanes portant des foulards ont à nouveau ressurgi dans les médias, comme au plus fort des consultations autour des accommodements raisonnables qui se sont pourtant terminées il y a presque un an.

 

Cette fois, l’opportunité est bien belle : la puissante Fédération des femmes du Québec s’est enfin rendue à l’évidence que la fonction publique et les services publics ne devraient pas continuer de nier les revendications des femmes musulmanes qui ont opté pour le voile. Un geste fort qu’attendaient de nombreux Québécois de confession musulmane.
Il ne fallait pas attendre longtemps pour que les ennemis jurés du foulard montent au créneau. Leurs arguments sont plus virulents que jamais. Traditionnellement, on ressort le sacrifice de la jeune Katia Bengana, assassinée par des extrémistes dans une Algérie en pleine guerre civile. Pourquoi alors ne pas évoquer le calvaire des enfants de Bentalha et Rais? Combien y a-t-il eu de sacrifiés parmi les enfants de familles soupçonnées de sympathiser avec les islamistes?

En dépit de toute ma bonne volonté, il m’est difficile de comprendre cette logique qui veut qu’on transpose un violent conflit se déroulant dans un pays, où la population n’a connu que la loi et les dérives d’une seule formation politique, au Québec où les institutions ne sont pas un concept creux. Ça frise la malhonnêteté intellectuelle! On pourrait même, pendant qu’on y est, nous parler des destructions de mosquées et d’églises dans l’Albanie d’Enver Hoxha! On use des arguments les plus fallacieux. Pourvu que ça arrange leurs affaires…
Il serait vain de citer toutes les fois où les Maghrébines voilées, puisque c’est d’elles qu’il s’agit, ont affiché leur volonté de s’intégrer dans la société québécoise. L’écrasante majorité d’entre elles porte le voile par conviction. Leur désir de faire partie d’un projet national est tout aussi indéniable. La présence de deux associations musulmanes lors de la récente assemblée générale spéciale à l’Université Laval en est un exemple de plus. En outre, la communauté musulmane est également traversée par divers courants. Les féministes voilées y sont légion. Les Québécoises pure laine aussi d’ailleurs.

Il n’y a pas longtemps, j’ai eu la surprise d’assister à une éclatante démonstration d’une Canadienne d’origine iranienne portant fièrement le problématique fichu. Sa démonstration portait sur l’utilisation du taser, un sujet très à l’heure. Il est vrai que la scène se passait dans une université de l’Ouest canadien, où les propagandistes du « tout laïc » n’ont pas le poids qu’ils ont au Québec. De même, depuis des années, des hommes portant des turbans font partie des effectifs de la Gendarmerie Royale du Canada sans qu’une quelconque tension s’en ressente. Les années ont donné raison à ceux qui, dès le départ, ont estimé que le port de signes ostentatoires comme le turban ne constitue nullement une menace à la paix dans la Cité.

L’exclusion est génératrice de frustration et de souffrances. C’est l’une des plus abjectes injustices. La raison ne devrait pas tolérer de telles pratiques, même au nom de la sacro-sainte laïcité. Le repli n’est pas la panacée à des situations découlant de nos différences. C’est ce que ne semblent pas comprendre ceux qui veulent nous ramener à la case départ, en ignorant les recommandations énoncées dans le rapport Bouchard-Taylor.