Lorsqu’on entre chez Anne Veillette, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, une bibliothèque remplie de livres d’enfants attire le regard près de l’entrée. Une petite maison de blocs Lego s’élève au beau milieu du corridor. Il est 10 h, et neuf enfants sont assis dans la cuisine, terminant de manger une pomme et de boire un verre de lait.

Mme Veillette tient une garderie en milieu familial depuis quatre ans. Pour rien au monde elle ne changerait de métier. Mais comme les quelque 14 000 éducatrices des services de garde en milieu familial du Québec, elle ignore encore l’impact qu’aura sur sa profession le nouveau droit de syndicalisation dont elle et ses collègues disposent à la suite de la récente abolition des lois 7 et 8.

«Tant que le gouvernement n’a pas statué sur ce qu’il fera, on ne sait pas ce qui se passera pour nous, explique la gardienne. Est-ce qu’on sera payé à l’heure au lieu d’être payé par enfant? C’est une des nombreuses questions qui planent encore», souligne celle qui gagne actuellement l’équivalent du salaire minimum. Mme Veillette ne se plaint pas de son salaire, mais souhaite au moins que ces changements la rendent admissible aux vacances et congés fériés payés, ce à quoi elle n’a jamais eu droit.

La présidente de la CSN, Claudette Carbonneau, se réjouit pour sa part de ce premier pas pour ces femmes. «L’inconstitutionnalité des lois 7 et 8 leur donne la possibilité de conquérir de véritables droits de négocier sur les normes du travail et l’équité salariale, la santé-sécurité et l’assurance-emploi», souligne Mme Carbonneau.

Impact sur la pénurie de places en garderie
La présidente de la CSN est optimiste quant à l’impact que peuvent avoir ces changements sur la pénurie de places en garderie. «Cela donnera plus de stabilité au secteur, offrira plus de formation aux travailleuses, et donc des services de qualité supérieure aux parents», croit-elle. «Nous manquons de places de garderie pour nos enfants. C’est important de reconnaître à sa juste valeur le métier de ces femmes», ajoute Mme Carbonneau.

Mme Veillette est bien d’accord avec la présidente de la CSN sur ce point. «C’est un métier plus difficile qu’on peut penser. C’est relativement facile de tomber en dépression nerveuse avec neuf enfants qui crient chez vous à longueur de journée», avoue-t-elle.

Mais puisque les gardiennes pourraient être éligibles à la CSST avec les changements qui devraient être apportés, Mme Veillette s’inquiète de l’impact que cela pourrait avoir pour les parents.
«Une garderie pourrait fermer du jour au lendemain si la gardienne tombe sur la CSST. J’espère seulement que les parents ne seront pas pénalisés là-dedans.»

Mais la gardienne et Mme Carbonneau espèrent surtout  que les meilleures conditions de travail qui s’annoncent inciteront un plus grand nombre de femmes à embrasser cette profession. Ainsi, tous sortiraient gagnants grâce à ces changements.

Source: http://www.journalmetro.com/carrieres/article/179316 

Comment?
Pour ouvrir une garderie en milieu familial subventionnée par le gouvernement (garderie à 7 $ la journée), une demande d’accréditation au bureau de coordinateur du quartier doit tout d’abord être faite. Plusieurs documents doivent être envoyés, dont un curriculum vitæ et un certificat médical. Une enquête d’antécédents judiciaires, des entrevues et une évaluation des connaissances d’intervention ainsi que du niveau de sécurité de la garderie et du matériel sont ensuite effectuées. Aucune formation n’est obligatoire, à l’exception d’un cours de secouriste, de 45 heures, si la demande d’accréditation est acceptée, et de 6 h de perfectionnement par année par la suite.

 

Loi 7 et 8
Ces lois adoptées en 2003 retiraient le droit de syndicalisation aux responsables des services de garde en milieu familial (RSG) et aux ressources intermédiaires et ressources de type familial (RIRTF). La cour supérieure du Québec a déclaré le 31 octobre dernier que ces lois étaient inconstitutionnelles et contrevenaient à la Charte canadienne des droits et libertés.