La bête islamophobe a encore frappé. Cette fois, elle a pris le visage d’un Allemand rapatrié des territoires de l’ex-Union soviétique, membre d’un de ces nombreux partis d’extrême-droite qui pullulent en Allemagne, un pays dont le passé nazi n’est pourtant pas si loin.

 

Le tueur a scrupuleusement choisi sa victime : Marwa al Sherbini, une jeune Égyptienne voilée enceinte de trois mois. Elle n’avait aucune chance de s’en sortir, étant donné que son bourreau s’est rué sur elle, alors qu’elle était en position assise en pleine confrontation dans un tribunal de la ville de Dresde. L’assassin lui asséna alors 18 coups de couteau devant une assistance médusée. Le mari de la victime qui a tenté de s’interposer au moment du drame a été, lui, gravement blessé.

L’odieux crime a choqué l’opinion publique en Égypte. L’exaspération a gagné d’autres pays musulmans ainsi que les communautés originaires de ces pays établies en Europe.
On peut se demander quel symbole peut encore servir de protection aux minorités musulmanes, quand on sait que l’assassinat de Marwa al Sherbini a été commis dans l’enceinte même d’une salle d’audience de la Cour d’appel de Dresde, une ville où, ces dernières années, la xénophobie et l’islamophobie ont gagné significativement du terrain. Plus grave, les autorités allemandes se sont gardées de dénoncer ce crime pendant une semaine, privilégiant d’abord la thèse d’un accident, ce qui laisse entendre une intention inavouée d’occulter le caractère xénophobe de la tragédie.

Pourtant, Marwa al Sherbini ne devait pas se trouver dans une salle d’un tribunal allemand. La jeune mère diplômée en pharmacie était, de l’avis même de ses connaissances, une personne très bien intégrée dans une région réputée pour être le nouveau terreau des groupuscules racistes. Les mauvaises langues n’ont rien à dire sur ses années passées en Allemagne. Elle aurait pu faire une carrière aussi magnifique que celle de sa compatriote, également voilée, devenue conseillère du président Barack Obama. Mais, à l’inverse des États-Unis, dans une grande partie d’Europe occidentale, l’heure est aux interdits et à la stigmatisation.

Le mari de la victime, un chercheur au prestigieux Max-Planck Institut, est également connu pour son intégrité et son dévouement. Ce n’était pas suffisant pour épargner à la jeune famille musulmane les frappes assassines d’un illuminé, de surcroît au chômage et vivant de l’aide sociale.
La jeune pharmacienne s’était présentée en cour pour témoigner contre son futur meurtrier qui auparavant l’avait injuriée, la traitant d’ « islamiste, de terroriste et de salope. » Il y a un an, l’assassin avait été condamné, en première instance, à verser à Marwa al Sherbini 780 euros de dommages et intérêts. Le procureur a fait appel de cette sentence jugée trop laxiste.

Si le bourreau a pu passer à l’acte, c’est en grande partie à cause (ou grâce!) au climat d’islamophobie rampante qui s’est installé dans certaines franges des sociétés occidentales. Ce climat est notamment nourri par des publications épisodiques sur « le péril vert ». Le voile islamique sert souvent de prétexte tout trouvé pour une stigmatisation bien réfléchie. Les arguments les plus farfelus sont mis de l’avant.

Le crime abject de Dresde a poussé le journal allemand à répondre à la question qui dérange, en affirmant sans fioritures : « La haine de l’islam est en train de devenir une forme acceptable du bon vieux racisme. » Force est de reconnaître que cette haine peut prendre différentes formes, y compris celle d’un médiocre brûlot littéraire.

Signe inquiétant : la mort de Marwa est loin de soulever en Occident la même indignation que celle suscitée par l’assassinat d’Ilan Halimi, un Juif français atrocement tué par ses geôliers, une bande de désoeuvrés d’une cité parisienne. Et dire qu’il y a encore quelques jours, on s’est épris pour le sacrifice de la jeune Neda, tombée sous les balles des bassidjis iraniens. Dans le cas de Marwa, on a droit, tout au plus, à un silence assourdissant.   
D’au autre côté, il est difficile de compter toutes les publications anti-islam qui sont parues ces dernières années, y compris au Québec. L’auteur du moindre pamphlet est savamment invité sur les plateaux de télévision et ses propos diffamants et injurieux envers les communautés musulmanes étalés dans les plus grands journaux locaux. Quand le sujet est « consommé » de fond en comble, il y a toujours le lobby islamophobe de Toronto pour passer à l’offensive!

À voir le peu d’empressement des leaders musulmans à prendre position, on se demande quel cataclysme pourrait les faire sortir de leur léthargie. On le sait, l’été est plus propice aux excursions et aux festivals. Alors, à la prochaine…publication sur le voile!

Arezki Sadat - Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.